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Un apéro avec Jeanne Mas : « J’ai fait la gentille, car c’était plus facile à vendre »

Dans notre souvenir, on avait quitté une petite punkette un peu énervée, maquillage lourd et eye-liner étiré sur les tempes. Quarante ans plus tard, on se retrouve en face d’une « Barbie girl ». A vrai dire, si elle n’avait pas été en train de se faire photographier, accoudée au bar de cet hôtel chic du 8e arrondissement, on n’aurait jamais reconnu Jeanne Mas. Lorsqu’on dansait en faisant d’amples et grotesques mouvements de bras sur Toute première fois, elle avait les cheveux noir corbeau, courts et en pétard, du rouge à lèvres sang, du violet sur les paupières, de grosses boucles d’oreilles et un bracelet de force au poignet. Ses cheveux ont poussé, sont devenus blonds, s’écoulent en cascades ondulées sur ses épaules frêles. Perchée sur des bottines à talons, Jeanne Mas porte un pantalon rose irisé qui rappelle plutôt les années disco, cils XXL et faux ongles rose layette.
En 2005, la chanteuse a pris ses cliques et ses claques pour s’installer aux Etats-Unis avec ses deux enfants. Près de vingt ans plus tard, elle est devenue complètement américaine : végane, sportive, versée dans la spiritualité ; la totale. Elle vit à Phoenix (Arizona), dans une maison avec jardin, ambiance un brin « popote » : « Je me suis rapprochée de la nature, j’ai beaucoup planté, j’ai passé mes journées dans les jardineries. » Parfois, elle danse toute seule dans son salon : « C’est excellent pour le cardio. » Elle croit en la réincarnation, discute avec ses plantes, dîne entre 17 heures et 18 heures, se couche avant 22 heures (« Après, je dors mal »), se lève « avec les poules, entre 4 et 5 heures ». L’apéro ne fait pas partie de sa vie. Exceptionnellement, elle s’octroie un verre de vin rouge, comme ce soir : « J’en profite, et puis c’est bourré d’antioxydants », pas comme la bière, « qui fait enfler ». « Dans la vie de tous les jours, je m’épluche quelques cacahouètes avant de manger des légumes. » Elle arbore une silhouette filiforme – il n’y a pas de miracle.
Cela va sans dire, la couverture de son dernier album, Phosphore, qui accompagne son retour sur la scène française, n’est plus du tout « en rouge et noir », mais dans les tons verts. On y voit une femme entourée de feuillages avec, en guise de tête, une boule à neige remplie de lys blancs, une fleur de paradis à la main, comme si elle s’était égarée dans une hallucination naturo-psychédélique.
Qui est vraiment Jeanne Mas ? On connaît les titres de ses tubes – Johnny, Johnny, En rouge et noir ou Sauvez-moi – mieux que sa bio. Un furetage consciencieux dans les articles qui lui ont été consacrés depuis le mitan des années 1980 ne nous éclaire pas beaucoup. A la manière de Mylène Farmer, l’autrice-compositrice s’est bien gardée de parler de sa vie privée. Sa notice biographique indique qu’elle est née le 28 février 1958 à Alicante, en Espagne, mais c’est en Italie qu’elle a d’abord tenté de percer, à 17 ans. Elle confie avoir toujours voulu être sur scène : « Enfant déjà, je montais des spectacles, j’avais besoin que l’on me voie, j’étais prête à tout pour attirer le regard des autres. » Après une « adolescence tourmentée », elle se voit rockeuse. « Je voulais être comme David Bowie », a-t-elle confié un jour. Mais tout ne se passe pas comme on veut dans la vie.
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